L’église de la Trinité (1861-67)
Place d’Estienne d’Orves
La façade principale
Une première église de la Trinité en bois polychrome avait été édifiée en 1852, rue de Clichy, à l’emplacement du parc d’attractions de la « Folie-Richelieu » ou « second Tivoli », qui succède à la Folie-Boutin, fermée en 1825. L’église actuelle, envisagée dans le cadre des transformations de Paris, sous le Second Empire, fut transférée quelques mètres plus bas, prenant la place du restaurant de la Grande Pinte.
L’architecte Théodore Ballu conçut une église aux proportions monumentales et au décor sculpté fort présent, destinée à marquer l’esprit des fidèles et des habitants du quartier. De style néo-Renaissance, inspirée à la fois par l’architecture italienne (Saint-Jean-de-Latran, à Rome) et l’architecture française, La Trinité est bâtie au-dessus d’un square ovale dessiné par Jean-Charles Alphand. Un groupe sculpté représentant La Charité, par Francisque Joseph Duret, et les figures de La Foi et de L’Espérance, du même artiste, se tiennent sur la balustrade de pierre bordant le grand escalier d’accès. Elles surplombent trois petites fontaines. Des rampes latérales permettaient aux voitures de passer sous le portique et de déposer leurs passagers à l’entrée de l’église.
La façade principale de l’église, tournée vers le sud, repose sur un portique percé de trois grandes arcades, dont les piliers portent des niches à sculpture, surmontées d’un fronton. La corniche du rez-de-chaussée supporte un « triforium » percé de fenêtres et décoré de pilastres, qui sert de soubassement à l’étage. En correspondance avec les arcades du portique, une rosace à remplages et deux baies cintrées marquent le second niveau, dont les travées sont délimitées par de puissants piliers. De même qu’au rez-de-chaussée, des niches à sculpture ornent les piliers de l’étage.
Le clocher
Quatre groupes sculptés, posés sur une balustrade de pierre, couronnent la façade à ses extrémités : ils représentent Les Vertus Cardinales, dont La Force de James Pradier et La Tempérance de Jean-Baptiste Carpeaux. Un clocher imposant, en forme de beffroi, flanqué de deux petits campaniles, se dresse quasiment à l’aplomb de la façade. Il s’appuie sur une base carrée, dans laquelle semble s’emboîter une structure octogonale, terminée par un dôme, puis un campanile marqué d’une croix. Les figures des quatre Évangélistes se tiennent aux angles du campanile.
La rue de la Trinité, contournant le chevet de l’église
Le corps de l’édifice s’insère entre les rues Morlot et de Cheverus ; la rue de la Trinité contourne le chevet de l’église.
Vue de la nef, vers le bas-côté est
L’église de la Trinité comprend une très large nef, flanquée d’étroits bas-côtés, qui longent huit chapelles latérales. Ces chapelles sont consacrées à des saints, à l’exception de la première chapelle du bas-côté ouest, qui abrite les fonds baptismaux.
La voûte en berceau de la nef est ponctuée d’un décor somptueux ornant clés, lunettes ou doubleaux, à motifs géométriques ou figures sur fond d’or. Ces éléments relient les deux peintures monumentales des arcs du chœur et de l’orgue : c’est Félix-Joseph Barrias (1822-1907) qui est l’auteur de La Sainte Trinité, sur l’arc du chœur.
L’élévation de la nef, vers le bas-côté est
L’élévation de la nef est à deux niveaux : grandes arcades et tribunes à balustrade (initialement réservées à Napoléon III et à sa cour). De larges pilastres, flanqués de colonnes tronquées, en alternance avec des colonnes à chapiteau composite, bordent la nef et les tribunes de l’étage.
Les niches du rez-de-chaussée, appuyées sur un entablement à consoles, abritent, sur le modèle du décor extérieur, des figures de saints, dont le nom est porté sur un cartouche. Les niches de l’étage, coiffées d’un dais gothique, reposent sur un cul-de-lampe.
Sur le revers de la façade principale, de part et d’autre de la porte d’entrée, deux niches abritent la figure d’un ange, dont le socle s’appuie sur un bénitier. La tribune de l’orgue repose sur d’imposantes consoles, qui redescendent sur de hautes colonnes. Entre ces supports, trois arcades voûtées en anse de panier, encadrent une tribune inférieure. Le grand arc de l’orgue, soigneusement décoré d’une peinture sur fond d’or, fait face au grand arc du chœur.
L’escalier ouest menant à la chapelle de la Vierge
Au fond des bas-côtés, deux escaliers à rampes de pierre et candélabres mènent, par un déambulatoire, à la chapelle de la Vierge, située derrière le chœur.
Le déambulatoire s’ouvre par deux portiques, coiffés d’une coupole, qui encadrent l’entrée du chœur. Surélevé de quelques marches, celui-ci est orné d’un grand autel en bronze doré. Le fidèle accède à la chapelle de la Vierge en empruntant, par la gauche ou par la droite, le vaisseau contournant le chœur : ce couloir de dégagement passe derrière la colonnade, qui délimite l’espace réservé au clergé, s’avance sous un nouveau portique à coupole, puis longe les trois arcades qui forment la clôture du chœur en hémicycle. Des tribunes à balustrade de pierre sont aménagées au-dessus du déambulatoire.
La chapelle Saint-Vincent-de-Paul et l’un des deux retables peints par Lecomte du Nouy
Des vitraux décoratifs à motifs géométriques éclairent faiblement les chapelles latérales, où la lumière tamisée est propice au recueillement et à la prière. En revanche, le verre blanc des fenêtres hautes laisse une lumière claire inonder la nef. Les chapelles latérales sont couvertes d’un plafond à caissons peints et dorés, dans l’esprit de la Renaissance française.
Jean-Jules-Antoine Lecomte du Nouÿ (1842-1923), second prix de Rome et chantre de l’Académisme, est l’auteur des deux grands retables de cette chapelle. Cet artiste entreprit deux voyages en Orient et s’imposa comme l’un des grands peintres orientalistes du dernier tiers du XIXe siècle.
Désiré-François Laugée (1823-1896)
L’Apothéose de sant Denis, 1876, Paris, église de La Trinité, chapelle Saint-Denis
Parmi les peintres d’histoire employés au décor des chapelles latérales, François-Louis Français (1814-1897) et Désiré-François Laugée (1823-1896) sont les représentants d’une génération d’artistes qui hésite entre la tradition académique et une peinture plus naturaliste. Portraitiste talentueux, Laugée se tourna à la fin de sa vie vers les scènes intimes de la vie à la campagne, dans le sillage de Millet.
De son côté, François-Louis Français, élève de Corot, fut d’abord un illustrateur réputé, puis l’un des premiers peintres de Barbizon, où il séjourna régulièrement pendant l’été, dès le milieu des années 1830. Il devint un artiste à la mode, très apprécié sous le Second Empire et la Troisième République. Cette faveur lui permit d’obtenir de grandes commandes, à l’exemple du retable d’Adam et Ève chassés du paradis (1878), où les protagonistes sont expulsés d’un paysage de sous-bois quelque peu exotique.
Félix-Joseph Barrias (1822-1907)
Sainte Geneviève distribuant des vivres, 1876, Paris, église de La Trinité, chapelle Sainte-Genevière
Second Prix de Rome en 1864, Eugène Thirion (1839-1910) fut l’un des artistes chargés de décorer l’Hôtel de la Païva, sur l’avenue des Champs-Élysées, avant de peindre les retables de la chapelle Saint-Joseph de l’église de La Trinité. Peintre de grand décor, Thirion intervint plus tard dans le décor du nouvel Hôtel de ville de Paris.
Prix de Rome en 1844, Félix-Joseph Barrias incarne quant à lui le renouveau de la peinture religieuse, dont il se fit la grande spécialité.
La chapelle de la Vierge
Dans la chapelle de la Vierge, les peintres-verriers Eugène-Stanislas Oudinot (1827-1889) et Auguste Leloir (1809-1892) réalisèrent les vitraux historiés des fenêtres hautes, consacrés à la vie de Marie. Au-dessus de l’autel et d’une statue de la Vierge à l’Enfant, sculptée par Paul Dubois, la voûte se compose de voûtains richement décorés qui rejoignent une clé pendante.
L’Adoration des Mages et La Fuite en Egypte
Jules-Élie Delaunay (1828-1891)
Les prophètes Isaïas et Ézéchiel, 1864-67, Paris, église de la Trinité, chapelle de la Vierge
En 1864, Jules-Elie Delaunay et Emile Levy (1826-1890) ont décoré les parois latérales de la chapelle. Du côté ouest, Delaunay a réalisé les figures des prophètes Isaïe et Ézechiel, au registre inférieur, et une grande peinture au registre supérieur, représentant L’Assomption de la Vierge. Du côté est, Lévy a imaginé les figures des prophètes Daniel et David au registre inférieur, et une grande peinture au registre supérieur, représentant La Présentation de la Vierge au Temple.
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